vendredi 25 septembre 2009

Miami-Vice (Michael Mann)



Alors là faut qu'on m'explique, avec Michael Mann. J'entends partout dire que c'est le cinéaste "post-moderne" ultime. J'ai même ouï dire par un docte que c'était un cinéaste "blanchotien". Rien que ça. J'ai peur de manquer le train de la post-modernité, mwa, alors. Parce que, comme pour les précédents de Mann: qu'est-ce que j'ai vu? Rien: une avalanche de clichés, une esthétique ronflante et tape à l'oeil de pub pepsi-soda.
La featurette présente Mann comme un véritable "géologue" qui cultive le "risque" maximal en tournant en extérieur, dans des zones qui ne se trouvent même pas recensées sur les cartes géographiques. C'est possible. Mais ça ne se voit pas. Moi j'ai vu que des cartes postales beaufisantes de couchers de soleil et de palmiers, que ce soit dans les quartiers de yuppies ou dans les bidonvilles, des diaporamas vus du ciel de off-shores rutilants, et tous les trucs et ficelles habituels de ce que peut offrir un clip maniéré mais déjà ringard sur MTV.
La B.O. nous immerge dans un jeu vidéo pour PS2 façon "splinter cell", j'ai même senti un "manque" à mon joystick qui me gratouillait comme un membre fantôme.
Colin Farrel emmène au débotté Gong-Li en off-shore, soyons fou, de Miami à Cuba, où elle lui fera goûter les meilleurs Mochitos de la planète. Comme c'est glamour. Après avoir bien dansé sur le meilleur band afro-cubain de Samba, avec des regards mouillés qui en disent plus long qu'une réclame pour Ferrero-Rocher, vlà qu'ça nique intense en causant parts de marchés pour faire "cynique" (alors qu'on sent bien, hein, qu'y z'ont un coeur tendre comme un marshmallow: émotion) comme dans "9 semaines et demi", dans la plus pure esthétique fashion-eighties. Alors, c'est ça le bonheur? Ah oui... mais non, y a du drame shakespearien là dessous: c'est un Montague et elle c'est une Capulet. Donc on a la gorge serrée pour nos deux tourtereaux high-tech transgressifs, d'autant qu'il y a le vilain barbu qui guette dans l'ombre de sa limousine aux vitres fumées: Yésus, l'archange, secondé par son Méphistophélès qui en pince aussi pour la belle classieuse en tailleur Chanel, comme un bossu de Notre Dame derrière ses Ray-Banes. Un grand sensible, lui aussi, un vrai coeur d'artichaut, malgré les flux capitaux. Eeeeh oui, c'est que l'argent ne fait pas le bonheur (émotion: la vraie vie est ailleurs. Message subliminal très déstabilisant et romantique, ça) .
Quant à la tempête sous un crâne de policiers exposés au fin dilemme existentiel (l'amour de la belle ou la lutte contre l'organisation du crime), on nous refait le même coup qu'avec Heat - clichetons de roman photo et pitch qui bouleverserait assurément quelque nightclubber de la high-society après s'être étourdi de champagne dans une "after". D'autant que ça se termine sur une belle chorégraphie de gun-fight où la compétence techno-scientifique en balistique se le dispute à la bravoure et se conclut par le sauvetage de la belle (libre, oui, mais à quel prix: à jamais perdue pour son loulou: émotion).
ça donne presque envie de tout plaquer, de quitter le ciel gris et lourd bas comme un couvercle de l'Ardèche francomtoise pour s'en aller joindre cette équipe ce team d'enfer de Fédéraux, et voir si la misère est moins pénible au soleil, des fois. Un Taf très dur, certes, mais ça pulse d'enfer, ça ravigote, hein. Et après, on s'étonne de la fuite des cerveaux dans les universités françaises en ingénierie génétique et en holding-marketing. Même la lettre de Guy Môquet lue à chaque rentrée scolaire à l'école de coiffure-manucure de Bourg-en-Brest ne parviendra pas à réfréner l'envol de nos têtes blondes pour des cieux où on a la décence minimum d'adjoindre au concept de sacrifice (franchement rébarbatif) l'alternative plus roborative d'une dépense sacrificielle.

Ou alors je suis à la traine d'un vieil humanisme riquiqui: c'est ça, le truc "post-moderne", y a plus que des clichés, toutes ces belles personnes promènent leur désœuvrement dans un monde planétisé par les vitesses, une jouissance presque désabusée, le simulacre est la seule réalité, les sentiments sont le souvenir spectral d'eux-mêmes, tout ça. Moi je veux bien. Mais pourquoi j'ai l'impression de voir un truc calibré pour de riches concepteurs publicitaires affairés entre deux jets ou des beaufs aspirant à la richesse clinquante des quartiers résidentiels de Miami? Ce n'est pas impunément qu'on m'inflige un remix de "in the air tonight" de Phil Collins, hein.


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