Dans une des ses chroniques humoresques qui font les délices des radiophiles, et spécialement des radiophiles fans de base de l’humour made in rtbf, notre pourfendeur des "agités du bocal" en tous genres (sur la confusion sémantique persistante autour de la vraie nature dudit "bocal", voir incise, point 2.1.) écrit, de cette plume clarifiante, au micro-laser qui signale l’homme de Droit, ces belles pages.
Traces d’une radio-phonè volatile, heureusement conservées dans la cyber-glaise, et qui devraient être enseignées dans tous les cours d'éducation à la citoyenneté:
" Sur cet attentat perpétré par deux agités du bocal contre le journal satirique Charlie Hebdo, tout a été dit : c'est criminel, c'est imbécile, etc..Mais il y a une question sur laquelle on entend beaucoup de bêtises depuis quelques jours, c'est à propos du « droit au blasphème ». On confond tout, je crois.
Ce qu'on appelle « droit au blasphème », ce n'est rien d'autre, en fait, que le droit de critiquer et de se moquer des religions. Droit à la liberté d'expression qui s'étend, dit la Cour européenne des droits de l'homme, jusqu'aux « propos qui blessent, qui choquent et qui inquiètent ».
Il est vrai que la Cour n'est pas toujours conséquente avec elle-même, et qu'elle a aussi validé des condamnations pour blasphème prononcées au Royaume-Uni ou en Autriche contre des cinéastes qui avaient tourné en dérision les fondamentaux du christianisme. Il est vrai aussi que les Églises font un lobbying de tous les diables (si j'ose dire) pour que l'Union Européenne protège les « symboles sacrés » des religions.
Donc, il faut être vigilant, mais enfin dans un pays comme la Belgique, on peut dire ce qu'on veut des religions, la seule limite étant l'incitation à la haine envers telle ou telle communauté. Non pas envers telle ou telle divinité céleste, abstraite, mais envers telle ou telle communauté concrète.
" Mais pour se retrouver condamné pour incitation à la haine, il faut avoir eu l'intention d'inciter à la haine, et qu'il y ait un risque réel sur la communauté religieuse. Bref, les conditions d'une condamnation sont très difficiles à remplir, et c'est heureux ! Pour rappel, les fameuses caricatures de Mahomet n'ont fait l'objet d'aucune condamnation judiciaire ni en Belgique ni en France.
Ces caricatures étaient légales, inoffensives - deux trois d'entre elles étaient d'ailleurs très drôles (d'autres beaucoup moins, mais c'est chacun son goût).
Par contre, le droit au blasphème, cela n'a aucun sens. C'est quoi, un blasphème ? Une parole qui outrage la divinité ou le sacré. Mais par définition, pour blasphémer, il faut croire, il faut appartenir à la religion que l'on blasphème. Sinon, le blasphème n'aurait aucun sens, et l'on ne s'en sortirait pas.
Par exemple, si je suis Chrétien et que je dis « Jésus n'est pas le Fils de Dieu, c'est un imposteur », je blasphème gravement ma religion, et il est juste que les foudres du droit canon s'abattent sur moi sans pitié. Mais la même phrase prononcée par un Juif ou un Musulman n'est pas blasphématoire, puisque c'est la doctrine même du judaïsme et de l'islam de considérer que Jésus n'est pas le fils de Dieu mais un simple humain comme les autres (un prophète estimable, ou un imposteur, c'est selon).
Inversement, si je suis Musulman et que je dis « le Coran n'est pas incréé, il n'a pas été dicté par Allah à Mahomet », je risque de passer un mauvais quart d'heure vendredi à la mosquée ; mais je suis Chrétien, il est parfaitement logique que je dise cela, puisque pour moi Chrétien, le Coran n'est pas un texte sacré, il ne peut donc avoir été dicté par Dieu à qui que ce soit.
Et quand Marx dit que la religion est « l'opium du peuple », ou Freud, qu'elle est forme de « névrose obsessionnelle », aucun des deux ne blasphème, puisqu'ils sont athées.
Donc, parlons de liberté d'expression, tout simplement, mais pas de droit au blasphème, qui n'a pas de sens. Si je suis croyant d'une religion, je n'ai aucun droit au blasphème envers les symboles sacrés de ma religion. Un dessinateur musulman ne représentera Mahomet avec un burnout en forme de bombe. Mais si je ne crois pas, je peux dire et montrer ce que je veux, Mahomet, Jésus ou Moïse en train de danser le french-cancan, cela ne sera jamais un blasphème, et si ça choque, ça s'appelle … la démocratie. "
Tout d'abord, c'est très beau. Comme d'habitude frappé au coin d'un solide bon sens. Et drôle. Fin, très fin, se mangeant sans faim.
Simple question de logique, en fait. Un enfant de cinq ans est censé le comprendre, bien que ce soit pas évident. Merci donc pour cette clarification utile. C'est du boulot, mine de rien, c'est d'la praxis. Je dirais même: de la praxis en action. Et je dirais même plus: de l'archéo-marxisme qui va loin, très loin, dans l'archè.
Alors, le blasphème, que je dise pas de connerie, ça concerne ceux qui croient en l'objet blasphémé, c'est grave pour eux ok, mais qu'y s'débrouillent entre eux, qu'ils lavent leur linge sale en famille. Chacun croit à son truc, sachant que c'est une pure abstraction, une idée céleste, conscient aussi que le truc du voisin est lui-même une pure abstraction, une idée céleste. Si un gus qui croit à la même abstraction céleste que lui se moque de cette abstraction, il est pas content: y a blasphème. Par contre, si le voisin d'à côté se fout de son abstraction à lui, il s'en fout, parce qu'il sait que son abstraction à lui, c'est logique que le voisin d'à côté s'en foute, tout comme il est normal qu'il s'en foute, lui, du truc abstrait du voisin. Et réciproquement, comme dirait Pierre Dac.
Non, c'est puissant. Fallait y penser.
Mais à la vérité, on s'en cogne éperdument, de cette fausse question du "blasphème".
Plutôt que de nous épater avec des trissotineries qui divertiraient à peine un cercle de philosophie analytique de Vienne ou d'Oxford à l'heure du thé, il eût été plus intéressant d'aborder la seule véritable question de fond, qui pose quelque problème un chouïa plus complexe, abritant des ambiguïtés suffisamment élastiques pour que les uns et les autres trouvent matière à y faire leur beurre et leur petite cuisine. La question du "droit à la caricature", de ses limites ou de ses non-limites, des poids et mesures qu'on y met, des frontières poreuses entre "abstrait" et "concret" qu'on placera et déplacera en fonction de la vitesse du vent et de l'âge du capitaine.
Le problème est, il est vrai, rapidement traité par la bande et prestement expédié par la grâce de cette subtile autant qu'évasive distinction entre "abstrait" et "concret":
ben oui, c'te bonne blague, évidemment qu'on y a droit, à la caricature, boudiou d'boudiou, du moment qu'on vise des symboles célestes et pas des personnes concrètes. Et saperlotte de crénom d'une pipe, c'est ça, la démocratie, m'gamin. C'est l'droit à l'expression de l'homme, vindiu!. Comprends-tu bien ou t'es nigaud, à c't'heure?
Oui, on comprend bien, merci. On comprend aussi, déjà, pour commencer, que la "démocratie" dont on nous peinturlure ici le portrait en deux coups de pinceau bien ajustés et avec une bonne grosse gouache qui tache, c'est une pure et fascinante abstraction, faite de segments, de fractales psychadéliks, de courbes fuyant au hasard dans l'espace en s'éloignant à toute allure les unes des autres, sans rime ni raison. Un nœud borroméen, une architecture impossible de Escher matérialisés dans un espace-temps non-euclidien. Un bocal d'un genre très nouveau: une bouteille de Klein en super digital 3D, uniquement visible dans certaines salles Imax avec les lunettes spéciales du Docteur Magellan.
La réalisation insolite d'une sorte de grand rêve universaliste abstrait fondé non pas sur du "différend", mais sur un différentialisme concret. Dans cette étrange contrée reculée, proche de la grande Garabagne, où nulle main du serpent n'a jamais posé le pied, il n'y a ni "même" ni "autre", ni dialectique ni absence de dialectique, ni "consensus" ni "dissensus"; il n'y a ni communication, ni traduction, ni interférence. Juste une diversité d'espèces indifférentes les unes aux autres à un degré introuvable dans la mère nature elle-même.. "Qui parle de lion à un passereau s'entend répondre: tchipp". Les cieux sont vides, circulez, y a rien à voir. Rentrez chez vous, chacun chez soi, un dieu pour chacun, et merde à tout le monde.
Je me demande même comment il est possible d'en causer. Faudrait inventer un Volapük modulable, disponible en kits aléatoires à partir desquels chacun construirait son propre langage privé, compréhensible par lui seul.
Quant à la "vision" bizarroïde des "rapports" qu'entretiendraient les religions avec elle-mêmes aussi bien qu'avec les autres, il s'agit là sans doute d'une toute nouvelle anhropologie culturelle, ne devant rien au diffusionnisme de Bronislaw Malinowski mais vaguement inspirée de la pataphysique d'Alfred Jarry. Dans un mauvais théâtre de l'absurde, par la troupe du Trianon, ça donnerait quelque chose comme:
- Tiens, moi je suis chrétien, je crois à Jésus mais je sais que c'est un truc pas concret, qu'existe pas. Ah salut, t'es chrétien, toi aussi? Comment? Tu te moques? Salaud, va, blasphémateur!
- Salut les mecs, je suis musulman, je crois à Mahomet, un autre truc abstrait. Vous vous moquez? Ben j'm'en cogne. Votre truc abstrait à vous, entre-nous, c'est pas ma came et ça me fait plutôt rigoler.
- Ah ouais, je te comprends, le tien aussi, note. Enfin, tu fais ce que tu veux, c'est pas notre problème.
- Youhouu, du bateau, salut les chrétiens et les musulmans, ça biche? Moi je suis juif, et j'ai un autre truc super abstrait qui m'botte pas mal.
- Mais fais ce que tu veux, mon gars, on s'en fout.
- Merci, sympa. Occupez-vous de vot'truc, en passant, je m'occupe du mien.
- Salut mes poules, je suis athée et je vous emmerde tous.
- Mais on s'en cague, bibiche, c'est tes oignons.
Non, c'est puissant. Fallait y penser.
Mais à la vérité, on s'en cogne éperdument, de cette fausse question du "blasphème".
Plutôt que de nous épater avec des trissotineries qui divertiraient à peine un cercle de philosophie analytique de Vienne ou d'Oxford à l'heure du thé, il eût été plus intéressant d'aborder la seule véritable question de fond, qui pose quelque problème un chouïa plus complexe, abritant des ambiguïtés suffisamment élastiques pour que les uns et les autres trouvent matière à y faire leur beurre et leur petite cuisine. La question du "droit à la caricature", de ses limites ou de ses non-limites, des poids et mesures qu'on y met, des frontières poreuses entre "abstrait" et "concret" qu'on placera et déplacera en fonction de la vitesse du vent et de l'âge du capitaine.
Le problème est, il est vrai, rapidement traité par la bande et prestement expédié par la grâce de cette subtile autant qu'évasive distinction entre "abstrait" et "concret":
ben oui, c'te bonne blague, évidemment qu'on y a droit, à la caricature, boudiou d'boudiou, du moment qu'on vise des symboles célestes et pas des personnes concrètes. Et saperlotte de crénom d'une pipe, c'est ça, la démocratie, m'gamin. C'est l'droit à l'expression de l'homme, vindiu!. Comprends-tu bien ou t'es nigaud, à c't'heure?
Oui, on comprend bien, merci. On comprend aussi, déjà, pour commencer, que la "démocratie" dont on nous peinturlure ici le portrait en deux coups de pinceau bien ajustés et avec une bonne grosse gouache qui tache, c'est une pure et fascinante abstraction, faite de segments, de fractales psychadéliks, de courbes fuyant au hasard dans l'espace en s'éloignant à toute allure les unes des autres, sans rime ni raison. Un nœud borroméen, une architecture impossible de Escher matérialisés dans un espace-temps non-euclidien. Un bocal d'un genre très nouveau: une bouteille de Klein en super digital 3D, uniquement visible dans certaines salles Imax avec les lunettes spéciales du Docteur Magellan.
La réalisation insolite d'une sorte de grand rêve universaliste abstrait fondé non pas sur du "différend", mais sur un différentialisme concret. Dans cette étrange contrée reculée, proche de la grande Garabagne, où nulle main du serpent n'a jamais posé le pied, il n'y a ni "même" ni "autre", ni dialectique ni absence de dialectique, ni "consensus" ni "dissensus"; il n'y a ni communication, ni traduction, ni interférence. Juste une diversité d'espèces indifférentes les unes aux autres à un degré introuvable dans la mère nature elle-même.. "Qui parle de lion à un passereau s'entend répondre: tchipp". Les cieux sont vides, circulez, y a rien à voir. Rentrez chez vous, chacun chez soi, un dieu pour chacun, et merde à tout le monde.
Je me demande même comment il est possible d'en causer. Faudrait inventer un Volapük modulable, disponible en kits aléatoires à partir desquels chacun construirait son propre langage privé, compréhensible par lui seul.
Quant à la "vision" bizarroïde des "rapports" qu'entretiendraient les religions avec elle-mêmes aussi bien qu'avec les autres, il s'agit là sans doute d'une toute nouvelle anhropologie culturelle, ne devant rien au diffusionnisme de Bronislaw Malinowski mais vaguement inspirée de la pataphysique d'Alfred Jarry. Dans un mauvais théâtre de l'absurde, par la troupe du Trianon, ça donnerait quelque chose comme:
- Tiens, moi je suis chrétien, je crois à Jésus mais je sais que c'est un truc pas concret, qu'existe pas. Ah salut, t'es chrétien, toi aussi? Comment? Tu te moques? Salaud, va, blasphémateur!
- Salut les mecs, je suis musulman, je crois à Mahomet, un autre truc abstrait. Vous vous moquez? Ben j'm'en cogne. Votre truc abstrait à vous, entre-nous, c'est pas ma came et ça me fait plutôt rigoler.
- Ah ouais, je te comprends, le tien aussi, note. Enfin, tu fais ce que tu veux, c'est pas notre problème.
- Youhouu, du bateau, salut les chrétiens et les musulmans, ça biche? Moi je suis juif, et j'ai un autre truc super abstrait qui m'botte pas mal.
- Mais fais ce que tu veux, mon gars, on s'en fout.
- Merci, sympa. Occupez-vous de vot'truc, en passant, je m'occupe du mien.
- Salut mes poules, je suis athée et je vous emmerde tous.
- Mais on s'en cague, bibiche, c'est tes oignons.
Et pour les autres, les démocrates, les laïques, attachés au legs de la civilisation des lumières, y sont pas concernés, y s'en foutent aussi. Pour eux, ce que font les uns et les autres, aux uns et aux autres, de leurs trucs abstraits, c'est juste de la caricature, point barre. Et la caricature, y z'y ont le droit pour tout le monde, toute la smala. Parce que c'est leur liberté de penser, comme disait Florent Pagny, ensuite de s'exprimer.
Ce très précieux droit à l'expression d'une parole si souvent réprimée, brimée, refoulée, cadenassée, par la machine du pouvoir oppresseur craignant tant la communication. Foucault avait esquissé un soupçon au sujet de l'expression libératrice. Mais on va pas s'attarder, après tout on est là pour le fun, le plaisir de la papote communicante. Non, juste qu'il suspectait que l'effectivité des dispositifs de pouvoir consistait bien plutôt à redouter le silence, les non-dits, les secrets chuchotés, voilés, et à valoriser la production proliférante des discours dévoilant intégralement les sujets, s'exposant et se racontant sans relâche, se rendant transparents à un quadrillage annulant progressivement les dehors, les zones indistinctes, ou d'indiscernabilité.
Deleuze, à ce propos, écrivait - et c'est un grand classique dont on pourrait causer à la reuteubeu:
Ce très précieux droit à l'expression d'une parole si souvent réprimée, brimée, refoulée, cadenassée, par la machine du pouvoir oppresseur craignant tant la communication. Foucault avait esquissé un soupçon au sujet de l'expression libératrice. Mais on va pas s'attarder, après tout on est là pour le fun, le plaisir de la papote communicante. Non, juste qu'il suspectait que l'effectivité des dispositifs de pouvoir consistait bien plutôt à redouter le silence, les non-dits, les secrets chuchotés, voilés, et à valoriser la production proliférante des discours dévoilant intégralement les sujets, s'exposant et se racontant sans relâche, se rendant transparents à un quadrillage annulant progressivement les dehors, les zones indistinctes, ou d'indiscernabilité.
Deleuze, à ce propos, écrivait - et c'est un grand classique dont on pourrait causer à la reuteubeu:
" On fait parfois comme si les gens ne pouvaient pas s’exprimer. Mais, en fait, ils n’arrêtent pas de s’exprimer. Les couples maudits sont ceux où la femme ne peut pas être distraite ou fatiguée sans que l’homme dise : « Qu’est-ce que tu as ? Exprime-toi… », et l’homme sans que la femme, etc. La radio, la télévision ont fait déborder le couple, l’ont essaimé partout, et nous sommes transpercés de paroles inutiles, de quantités démentes de paroles et d’images. La bêtise n’est jamais muette ni aveugle. Si bien que le problème n’est plus de faire que les gens s’expriment, mais de leur ménager des vacuoles de solitude et de silence à partir desquelles ils auraient enfin quelque chose à dire.
Les forces de répression n’empêchent pas les gens de s’exprimer, elles les forcent au contraire à s’exprimer. Douceur de n’avoir rien à dire, droit de n’avoir rien à dire, puisque c’est la condition pour que se forme quelque chose de rare ou de raréfié qui mériterait un peu d’être dit. Ce dont on crève actuellement, ce n’est pas du brouillage, c’est des propositions qui n’ont aucun intérêt. Or ce qu’on appelle le sens d’une proposition, c’est l’intérêt qu’elle présente. Il n’y a pas d’autre définition du sens, et ça ne fait qu’un avec la nouveauté d’une proposition. On peut écouter des gens pendant des heures : aucun intérêt… C’est pour ça que c’est tellement difficile de discuter, c’est pour ça qu’il n’y a pas lieu de discuter, jamais. On ne va pas dire à quelqu’un : « Ça n’a aucun intérêt, ce que tu dis ! » On peut lui dire : « C’est faux. » Mais ce n’est jamais faux, ce que dit quelqu’un, c’est pas que ce soit faux, c’est que c’est bête ou que ça n’a aucune importance. C’est que ça a été mille fois dit. Les notions d’importance, de nécessité, d’intérêt sont mille fois plus déterminantes que la notion de vérité. Pas du tout parce qu’elles la remplacent, mais parce qu’elles mesurent la vérité de ce que je dis. Même en mathématiques : Poincaré disait que beaucoup de théories mathématiques n’ont aucune importance, aucun intérêt. Il ne disait pas qu’elles étaient fausses, c’était pire."
Sinon, pour en revenir à des trucs plus funs, plus légers, on est ravi d'apprendre que l'humoriste en question est pas du tout coincé en matière d'humour, de rigolade, comme garçon. En effet, un rien l'amuse et il est jamais le dernier à garder pour la bonne bouche une de ces histoires de toto gratinées pour faire marrer les convives à la fin du banquet.
Les caricatures danoises de Mahomet, par Kurt Westegaard (invité d'honneur en septembre 2008, avant de caner dignement, du congrès du Dansk Folkeparti, le parti danois d'extrême-droite), courageusement relayées en leur temps par Charlie Hebdo, par exemple, ça l'avait plutôt poilé.
Le prophète, c'était pas tant qu'il soit prophète, qui avait tirlipoté quelques uns, dont ma pomme. C'était que sous son turban faisant office de bombinette, y avait un stéréotype ethno-facial très rigolo: le nez crochu, le sourcil fourbe et broussailleux, comme le rictus sous la barbe dissimulatrice.
Il y eut aussi, rappelons-le, embarqué dans cette croisade au souffle homérique, marquant le retour, enfin, du courage, le courage d'un "parler-vrai" balayant la langue de bois et la bienpensance frileuse des bobos (comme dit Zemmour), le caricaturiste néerlandais Gregorius Nekschot, autre martyr de la liberté d'expression selon Val & Fourest.
Cette dernière, fort sourcilleuse sur la liberté d'expression des démocraties, danoises ou hollandaises, lui rendit visite aux Pays-Bas pour une interview exclusive, parue en juin 2008 dans Charlie Hebdo, soit deux ans après la publication des caricatures danoises. Nekschot y déclare: "les musulmans doivent comprendre que l’humour fait partie de nos traditions depuis des siècles". Parmi ces manifestations d'humour, on trouve, entre autres, un imam imposant une fellation tantôt à une petite fille voilée, tantôt à la petite Anne Frank. Plus loin, le même, ou un autre, sodomise une chèvre en déclarant: "il faut savoir partager les traditions". Nekschot est un anti-multiculturaliste libertaire qui se censure pas, jamais. Vachement subversif, il enfonce grave tous les tabous. Et bien sûr, il a un gros, très gros potentiel de libération pulsionnelle au niveau du sexe, sujet qui le passionne. Trublion haut en couleurs d'une époque révolue: celle d'une presse libre et indépendante. Fourest de conclure, à l'époque, que si de tels traits d'humour peuvent parfois manquer de finesse, il faut, pour mieux en apprécier la portée, les resituer "dans un contexte néerlandais ultratolérant, voire angélique, envers l’intégrisme". (Pour plus de détails sur les combats menés par Charlie Hebdo - à l'époque de Philippe Val & Caroline Fourest - pour la défense de nos démocraties laïques, voir ci-dessous les articles de Mona Chollet placés en liens).
Alors ne faisons pas les prudes protestants, les bégueules. Faut se décoincer un peu le cul, je dis. Même si on aime pas ça, c'est un bon signe pour la bonne santé de nos démocraties. Moi, j'suis démocrate. Je m'incline devant ces choses là, même si ça me fait pas plaisir. Parce que c'est ça, la démocratie. Eh quoi, allez-y voir un peu, dans les anciens asiles psychiatriques abandonnés en Sibérie, si on se marrait tant que ça, si on avait droit à la caricature. Je peux vous garantir qu'on s'agitait pas le bocal tous les jours.
Il y eut aussi, rappelons-le, embarqué dans cette croisade au souffle homérique, marquant le retour, enfin, du courage, le courage d'un "parler-vrai" balayant la langue de bois et la bienpensance frileuse des bobos (comme dit Zemmour), le caricaturiste néerlandais Gregorius Nekschot, autre martyr de la liberté d'expression selon Val & Fourest.
Cette dernière, fort sourcilleuse sur la liberté d'expression des démocraties, danoises ou hollandaises, lui rendit visite aux Pays-Bas pour une interview exclusive, parue en juin 2008 dans Charlie Hebdo, soit deux ans après la publication des caricatures danoises. Nekschot y déclare: "les musulmans doivent comprendre que l’humour fait partie de nos traditions depuis des siècles". Parmi ces manifestations d'humour, on trouve, entre autres, un imam imposant une fellation tantôt à une petite fille voilée, tantôt à la petite Anne Frank. Plus loin, le même, ou un autre, sodomise une chèvre en déclarant: "il faut savoir partager les traditions". Nekschot est un anti-multiculturaliste libertaire qui se censure pas, jamais. Vachement subversif, il enfonce grave tous les tabous. Et bien sûr, il a un gros, très gros potentiel de libération pulsionnelle au niveau du sexe, sujet qui le passionne. Trublion haut en couleurs d'une époque révolue: celle d'une presse libre et indépendante. Fourest de conclure, à l'époque, que si de tels traits d'humour peuvent parfois manquer de finesse, il faut, pour mieux en apprécier la portée, les resituer "dans un contexte néerlandais ultratolérant, voire angélique, envers l’intégrisme". (Pour plus de détails sur les combats menés par Charlie Hebdo - à l'époque de Philippe Val & Caroline Fourest - pour la défense de nos démocraties laïques, voir ci-dessous les articles de Mona Chollet placés en liens).
Alors ne faisons pas les prudes protestants, les bégueules. Faut se décoincer un peu le cul, je dis. Même si on aime pas ça, c'est un bon signe pour la bonne santé de nos démocraties. Moi, j'suis démocrate. Je m'incline devant ces choses là, même si ça me fait pas plaisir. Parce que c'est ça, la démocratie. Eh quoi, allez-y voir un peu, dans les anciens asiles psychiatriques abandonnés en Sibérie, si on se marrait tant que ça, si on avait droit à la caricature. Je peux vous garantir qu'on s'agitait pas le bocal tous les jours.
Y en a un peu marre des intimidations sur la sacro-sainte intouchabilité ou non-représentabilité des icônes. Voltaire est passé par là, quoi. Dégrafons un peu le slip, à la fin, cool, décontractés. Sinon, c'est comme il dit, c'est chacun son goût. Et les goûts et les couleurs, ça se discute pas. Même chez les postkantiens, ça se discute plus, on s'en tamponne. C'est quoi, cette prétention ridicule à l'universalité? Parce que moi, j'aime les chansons d'Yves Duteil, je pose que la beauté des chansons d'Yves Duteil est en droit partageable par tous? C'est pas moderne, ça. C'est pas décontracté.
Bon, j'avoue, moi-même j'étais un peu constipé. J'avais écrit, à l'époque, à propos des "caricatures danoises":
" Le même saisissant art de croquer, avec toutes les caractéristiques y afférant, on ne sait trop quel représentant iconique du prophète, mais ethnologiquement bien situé, aux sombres desseins envahissants et hostiles, bien entendu, joints à l’inénarrable rictus stercoraire du fanatique de base, n’aurait pas déparé, par son esthétique plus que relativement nauséabonde, et dans un passé encore récent, dans un édito de « je suis partout », s’il s’était agi de « croquer » le Juif.Mais ne faisons pas deux poids deux mesures. Monsieur Philippe Val, avec la rigueur et la compétence du vilipendeur de toutes les formes de racisme religieux ou ethnique, a su surmonter avec panache ce type de scrupules éthiques, en nos temps sombres, troubles et menacés.Il a su avec courage ne pas surfer sur les peurs archaïques d’invasions barbares, éviter de brasser l’air dans les espaces démago-populistes de jadis-Le Pen, et, avec une imparable rigueur dans l’analyse socio-ethno-politique de la mondialisation, ne pas emboîter le pas aux harangues sur le choc des civilisations martelées par quelque idéologue rigoureux néocon. "
Mais notre nouveau François Pirette, qui ne doit pas souvent ouvrir Charlie-Hebdo, car ça fait bien longtemps que cette grasse feuille de chou pseudo-libertaire ne fait plus rire personne (sauf peut-être au club de l'Horloge), est nonobstant attentif et vigilant sur toutes ces choses par ailleurs évidentes.
D'ailleurs, soyons bien clairs sur un truc précis: c'est pas parce que la devanture de Charlie Hebdo exhale de vagues (?) miasmes de poisson pas très frais que j'applaudis des deux mains au fait que deux atrophiés du bulbe, certainement fanatiques et ça personne le contestera, fasse sauter les locaux et le matériel informatique de journalistes libres et indépendants, travaillant d'arrache-pied à la promotion de la tolérance et à la défense des valeurs démocratiques. Non, ça, comme tout le monde, je réprouve énergiquement. Moi, je suis comme Voltaire, je me battrai jusqu'au sang, et avec mes petits poings, pour que chacun chacune ait le droit d'exprimer une opinion que je ne partage pas. Mais pas en faisant acte de violence ou de terrorisme.
Quand je suis pas d'accord, je mobilise mon droit à caricaturer des caricatures. Je me contente de pouffer dans mon coin, d'un rire asthmatique, comme Diabolo le chien à Satanas, en usant de ma liberté d'expression d'l'homme. Et si parfois - rarement - je m'autorise à ricaner de façon choquante, blessante ou inquiétante, c'est quand violence est faite à l'homme universel dans sa diversité et divers dans son universalité, comme dirait là encore Pierre Dac. Sur cette question, je le confesse, j'ai toujours un petit pet de travers et je suis un peu coincé de l'anus. A cet égard, je me définis personnellement, sur le plan philosophique, non pas comme archéo-marxiste, mais comme protestant-oécuménique. Ce qui m'a d'ailleurs valu quelques railleries & excommunications dont auquel je ne prends pas ombrage.
Donc, plus que jamais, faut rester vigilant sur le droit à la libre expression non-violente des points de vue des uns et des autres.
Et la vigilance, chez notre radio-chroniqueur de billets d'humeur, c'est pour ainsi dire une seconde nature, vu qu'accessoirement, comme violon d'Ingres, il fait aussi directeur d'un "Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme". On va donc pas se couvrir davantage de ridicule à pontifier ou enfoncer des portes ouvertes. Il prend bien soin lui-même de nous le rappeler, tout ça, et de bien nous expliquer que chez nous, en Belgique, on confond pas une abstraction céleste et une communauté concrète:
D'ailleurs, soyons bien clairs sur un truc précis: c'est pas parce que la devanture de Charlie Hebdo exhale de vagues (?) miasmes de poisson pas très frais que j'applaudis des deux mains au fait que deux atrophiés du bulbe, certainement fanatiques et ça personne le contestera, fasse sauter les locaux et le matériel informatique de journalistes libres et indépendants, travaillant d'arrache-pied à la promotion de la tolérance et à la défense des valeurs démocratiques. Non, ça, comme tout le monde, je réprouve énergiquement. Moi, je suis comme Voltaire, je me battrai jusqu'au sang, et avec mes petits poings, pour que chacun chacune ait le droit d'exprimer une opinion que je ne partage pas. Mais pas en faisant acte de violence ou de terrorisme.
Quand je suis pas d'accord, je mobilise mon droit à caricaturer des caricatures. Je me contente de pouffer dans mon coin, d'un rire asthmatique, comme Diabolo le chien à Satanas, en usant de ma liberté d'expression d'l'homme. Et si parfois - rarement - je m'autorise à ricaner de façon choquante, blessante ou inquiétante, c'est quand violence est faite à l'homme universel dans sa diversité et divers dans son universalité, comme dirait là encore Pierre Dac. Sur cette question, je le confesse, j'ai toujours un petit pet de travers et je suis un peu coincé de l'anus. A cet égard, je me définis personnellement, sur le plan philosophique, non pas comme archéo-marxiste, mais comme protestant-oécuménique. Ce qui m'a d'ailleurs valu quelques railleries & excommunications dont auquel je ne prends pas ombrage.
Donc, plus que jamais, faut rester vigilant sur le droit à la libre expression non-violente des points de vue des uns et des autres.
Et la vigilance, chez notre radio-chroniqueur de billets d'humeur, c'est pour ainsi dire une seconde nature, vu qu'accessoirement, comme violon d'Ingres, il fait aussi directeur d'un "Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme". On va donc pas se couvrir davantage de ridicule à pontifier ou enfoncer des portes ouvertes. Il prend bien soin lui-même de nous le rappeler, tout ça, et de bien nous expliquer que chez nous, en Belgique, on confond pas une abstraction céleste et une communauté concrète:
"[...] Donc, il faut être vigilant, mais enfin dans un pays comme la Belgique, on peut dire ce qu'on veut des religions, la seule limite étant l'incitation à la haine envers telle ou telle communauté. Non pas envers telle ou telle divinité céleste, abstraite, mais envers telle ou telle communauté concrète."
Et c'est ben vrai ça, comme disait Mère Denis.
Donc, résumons-nous:
Si je suis musulman et que j'accroche des vessies de porc aux boucles d'oreille du prophète, je risque de passer un sale quart d'heure à la mosquée, et je fais rien qu'à emmerder ma communauté religieuse abstraite.
Si je suis pas musulman et que j'accroche des vessies de porc aux boucles d'oreille du prophète, bon ben c'est à peu près pareil: j'indispose une communauté religieuse abstraite, à ceci près que c'est pas la mienne. Je ne passerai donc pas un sale quart d'heure à la mosquée, puisque je fréquente pas les mosquées.
Ils sont susceptibles sur les icônes saintes intouchables, ok, c'est leur problème, leur petite tambouille religieuse. Mais moi, je m'en fous de ça, j'suis démocrate, laïque, j'suis pas concerné, comprenez? J'insulte personne. Où est l'incitation à la haine, là-dedans? J'emmerde pas les braves musulmans qui font partie d'une communauté concrète de musulmans, je me moque juste des « symboles sacrés » de leur religion, de leur icône abstraite ou céleste qu'y prennent pour concrète.
En dehors de ça, ben quoi, y a pas d'lézards. Faut vraiment être des agités du bocal, un peu et même carrément arriérés sur les bords, incapables de comprendre que dans nos démocraties modernes, cool, décontractées, représentées par un organe de presse démocratique moderne, cool, décontracté, comme Charlie Hebdo, on s'en bat le steak de la coupe de cheveux et de la garde-robe du prophète. Sont trop cons, en plus d’être des criminels : z'arrivent tout simplement pas à percuter que si ça les emmerde, eux, ça nous emmerde pas, nous. C'est pourtant simple.
Oui, parce qu'ils sont un peu en retard, faut comprendre, sur la distinction entre société civile et société religieuse de nouz'autres. Non, vous savez, ces gens là, ils ont déjà du mal avec la distinction, pourtant évidente, entre "abstrait" et "concret". Sans déconner, pour eux, cette distinction est abstraite, mais ça, ils le savent pas, et pour cause. Ces zouaves sont restés prisonniers de la pensée magique.
Enfin, quand on réfléchit un peu, au niveau de l'archè, c'est pas si évident non plus à saisir, quand on y pense, "abstrait/concret". Si je crois très fort en un dieu, même en poussant assez loin le bouchon dans une réflexion très "méta" autour de ça, comme un Jean-Luc Marion, est-ce que j'ai bien conscience, au moins, que c'est un bidule purement abstrait? Enfin, pas concret du tout, quoi, s'tu veux, comme la môme néant, là, qui existe pô. Une idéalité céleste, je veux dire, au sens du ciel des idées de Platon. Un étant suprême, mais bizarrement, qu'est pas là à la manière d'un autre étant. Est-ce qu'au moins quelqu'un d'un peu finaud m'a mis au parfum de cette sophistication? Chais pas, même Platon, éventuellement, y pensait ptêt pas que le ciel des idées, c'était abstrait, comme truc.
Non, moi y a un truc qui me dépasse, c'est les bouseux qui croient encore à un dieu. Sont pas post-modernes, ces gens là. Non allez, franchement, imagine un peu: ces gens-là, y croient à un dieu, et le plus comique dans cette affaire, c'est qu'y soupçonnent même pas que ce dieu, abstrait ou concret, tout le monde s'en fout sauf eux, tout le monde trouve que c'est une grosse farce sauf eux. Tous les gens normaux, enfin je veux dire évolués, savent ou ont compris que c'est un truc abstrait, qu'a aucune réalité. Mais eux non: y croient que ça existe vraiment, que c'est réel. Et partant de là, ils ne captent pas immédiatement que pour toi, c'est tellement une grosse farce ridicule que t'as évidemment le droit de t'en moquer, d'en rigoler à gorge déployée, en te tapant sur les fesses tellement c'est marrant.
C'est un peu comme si, je sais pas, moi, je crois que la démocratie, c'est concret, même si paradoxalement, ça existe pas; c'est pas une chose, un état de chose, c'est pas un étant qu'est là, c'est un projet indéterminé, une exigence, une promesse, une case-vide, que sais-je; ça existe tellement pas qu'y faut l'inventer - et l'inventer constamment, sinon on est tout près à croire que c'est arrivé. Et faut dire que pour certains, c'est une Chôse tenant à la fois de la magie et du sacré. La magie du Nombre, et le sacré du décompte des urnes. Mais je crois très fort à ce principe, je crois que ce principe abstrait-concret, présent-absent, est le partage le plus proche de la vérité concrète. J'y tiens par dessus tout, et je me bats pour ça, c'est un truc que je prends très au sérieux, je suis vachement engagé et tout. Je suis un peu comme Philippe Val, quoi. Et je trouve mon truc tellement bath, que je voudrais que tous les ptits gars et toutes les ptites gates du monde, encore sous le joug de la pensée magique ("participative" selon Lévy-Bruhl), se rallient en masse à ma lanterne éclairant l'univers.
Là dessus, y a un grossier merle, beauf et rougeaud, pas très culturé, sentant un peu le graillon et la vinasse (comme aime à dire Philippe), qui se radine et qui me pète de rire à la tronche en disant: oh le con, le veau, y croit en un machin abstrait qui existe pas, eh, laissez moi m'marrer, mais c'est du vent, ton truc, c'te bonne blague. Attends un peu, je m'en vais barbouiller ta grosse merde, moi.
Alors, évidemment, moi, je suis comme Philippe: j'suis ptêt raffiné, érudit, n'aimant rien tant qu'à me plonger avec délice dans mon exemplaire collector du tractatus théologico-politicus avec les notes infra-paginales d'Alain Minc et la special-dédicace de Robert Redeker. Mais je suis aussi un mec cool, moderne, décontracté. Je me prends pas au sérieux, j'suis pas le mec arrogant. Je vais me marrer à couilles rabattues avec ce gros beauf suintant, selon la vision démocratique du beauf popularisée par mon pote Cabu dans Charlie, sans arrière pensée, parce que déjà, si ça se trouve, j'y crois même pas moi-même à mon truc, je suis pas sérieux et je suis le premier à plaisanter là-dessus. Si ça se trouve, on va se prendre une bonne biture ensemble, puis on ira voir les putes en criant "mort aux vaches!", pour réveiller en plein milieu de la nuit les bourgeois-bobos qui se lèvent à cinq heures pour aller chercher du poisson frais dans la dernière poissonnerie hype de leur quartier chic. Ben voilà, c'est ça, nous on est des mecs cools, pas arrogants, pas constipés, qui se prennent pas au sérieux et qui font pas les fiers. On imagine pas une seconde que si un agité du bocal vient se foutre de notre gueule en crachant sur des principes, des symboles abstraits qui nous sont chers, on va prendre la mouche, lui plastiquer sa limousine ou l'assigner en diffamation. On est pas comme ça.
Mais ces gens-là, y sont pas comme nous. Déjà qu'y comprennent pas bien ce que c'est qu'une "abstraction céleste". Non, moi je dis toujours, ces gens là, tu les emmènes au musée voir la pomme à Van Gogh, eh ben y veulent croquer la pomme, à tous les coups. Alors c'est pas difficile d'imaginer qu'ils ont pas bien percuté la nouvelle donne que représente l'avancée laïque dans nos démocraties modernes, la séparation de l’église et de l’état, tout ça.
En dehors de ça, ben quoi, y a pas d'lézards. Faut vraiment être des agités du bocal, un peu et même carrément arriérés sur les bords, incapables de comprendre que dans nos démocraties modernes, cool, décontractées, représentées par un organe de presse démocratique moderne, cool, décontracté, comme Charlie Hebdo, on s'en bat le steak de la coupe de cheveux et de la garde-robe du prophète. Sont trop cons, en plus d’être des criminels : z'arrivent tout simplement pas à percuter que si ça les emmerde, eux, ça nous emmerde pas, nous. C'est pourtant simple.
Oui, parce qu'ils sont un peu en retard, faut comprendre, sur la distinction entre société civile et société religieuse de nouz'autres. Non, vous savez, ces gens là, ils ont déjà du mal avec la distinction, pourtant évidente, entre "abstrait" et "concret". Sans déconner, pour eux, cette distinction est abstraite, mais ça, ils le savent pas, et pour cause. Ces zouaves sont restés prisonniers de la pensée magique.
Enfin, quand on réfléchit un peu, au niveau de l'archè, c'est pas si évident non plus à saisir, quand on y pense, "abstrait/concret". Si je crois très fort en un dieu, même en poussant assez loin le bouchon dans une réflexion très "méta" autour de ça, comme un Jean-Luc Marion, est-ce que j'ai bien conscience, au moins, que c'est un bidule purement abstrait? Enfin, pas concret du tout, quoi, s'tu veux, comme la môme néant, là, qui existe pô. Une idéalité céleste, je veux dire, au sens du ciel des idées de Platon. Un étant suprême, mais bizarrement, qu'est pas là à la manière d'un autre étant. Est-ce qu'au moins quelqu'un d'un peu finaud m'a mis au parfum de cette sophistication? Chais pas, même Platon, éventuellement, y pensait ptêt pas que le ciel des idées, c'était abstrait, comme truc.
Non, moi y a un truc qui me dépasse, c'est les bouseux qui croient encore à un dieu. Sont pas post-modernes, ces gens là. Non allez, franchement, imagine un peu: ces gens-là, y croient à un dieu, et le plus comique dans cette affaire, c'est qu'y soupçonnent même pas que ce dieu, abstrait ou concret, tout le monde s'en fout sauf eux, tout le monde trouve que c'est une grosse farce sauf eux. Tous les gens normaux, enfin je veux dire évolués, savent ou ont compris que c'est un truc abstrait, qu'a aucune réalité. Mais eux non: y croient que ça existe vraiment, que c'est réel. Et partant de là, ils ne captent pas immédiatement que pour toi, c'est tellement une grosse farce ridicule que t'as évidemment le droit de t'en moquer, d'en rigoler à gorge déployée, en te tapant sur les fesses tellement c'est marrant.
C'est un peu comme si, je sais pas, moi, je crois que la démocratie, c'est concret, même si paradoxalement, ça existe pas; c'est pas une chose, un état de chose, c'est pas un étant qu'est là, c'est un projet indéterminé, une exigence, une promesse, une case-vide, que sais-je; ça existe tellement pas qu'y faut l'inventer - et l'inventer constamment, sinon on est tout près à croire que c'est arrivé. Et faut dire que pour certains, c'est une Chôse tenant à la fois de la magie et du sacré. La magie du Nombre, et le sacré du décompte des urnes. Mais je crois très fort à ce principe, je crois que ce principe abstrait-concret, présent-absent, est le partage le plus proche de la vérité concrète. J'y tiens par dessus tout, et je me bats pour ça, c'est un truc que je prends très au sérieux, je suis vachement engagé et tout. Je suis un peu comme Philippe Val, quoi. Et je trouve mon truc tellement bath, que je voudrais que tous les ptits gars et toutes les ptites gates du monde, encore sous le joug de la pensée magique ("participative" selon Lévy-Bruhl), se rallient en masse à ma lanterne éclairant l'univers.
Là dessus, y a un grossier merle, beauf et rougeaud, pas très culturé, sentant un peu le graillon et la vinasse (comme aime à dire Philippe), qui se radine et qui me pète de rire à la tronche en disant: oh le con, le veau, y croit en un machin abstrait qui existe pas, eh, laissez moi m'marrer, mais c'est du vent, ton truc, c'te bonne blague. Attends un peu, je m'en vais barbouiller ta grosse merde, moi.
Alors, évidemment, moi, je suis comme Philippe: j'suis ptêt raffiné, érudit, n'aimant rien tant qu'à me plonger avec délice dans mon exemplaire collector du tractatus théologico-politicus avec les notes infra-paginales d'Alain Minc et la special-dédicace de Robert Redeker. Mais je suis aussi un mec cool, moderne, décontracté. Je me prends pas au sérieux, j'suis pas le mec arrogant. Je vais me marrer à couilles rabattues avec ce gros beauf suintant, selon la vision démocratique du beauf popularisée par mon pote Cabu dans Charlie, sans arrière pensée, parce que déjà, si ça se trouve, j'y crois même pas moi-même à mon truc, je suis pas sérieux et je suis le premier à plaisanter là-dessus. Si ça se trouve, on va se prendre une bonne biture ensemble, puis on ira voir les putes en criant "mort aux vaches!", pour réveiller en plein milieu de la nuit les bourgeois-bobos qui se lèvent à cinq heures pour aller chercher du poisson frais dans la dernière poissonnerie hype de leur quartier chic. Ben voilà, c'est ça, nous on est des mecs cools, pas arrogants, pas constipés, qui se prennent pas au sérieux et qui font pas les fiers. On imagine pas une seconde que si un agité du bocal vient se foutre de notre gueule en crachant sur des principes, des symboles abstraits qui nous sont chers, on va prendre la mouche, lui plastiquer sa limousine ou l'assigner en diffamation. On est pas comme ça.
Mais ces gens-là, y sont pas comme nous. Déjà qu'y comprennent pas bien ce que c'est qu'une "abstraction céleste". Non, moi je dis toujours, ces gens là, tu les emmènes au musée voir la pomme à Van Gogh, eh ben y veulent croquer la pomme, à tous les coups. Alors c'est pas difficile d'imaginer qu'ils ont pas bien percuté la nouvelle donne que représente l'avancée laïque dans nos démocraties modernes, la séparation de l’église et de l’état, tout ça.
Parce que nous, faut le dire aussi, ça, on en a un peu fini avec les images pieuses qu'on distribue au catéchisme. Bon, toute façon, laisse tomber, va, c'est pas la peine, y comprennent rien. Comme dit Philippe, c'est des illettrés, j'te dis, des paysans. Non mais quoi, essaie un peu d'expliquer la démocratie moderne à des éleveurs de chèvres, t'es pas rendu, j'te l'dis. Et comme disait Daniel Leconte dans son hagiographie iconique de Philippe Val menant croisade pour le droit à la coolitude décontractée de nos démocraties modernes, citant sa Une de Charlie: "c'est dur d'être aimé par des cons". Bon, maintenant, c'est plus Philippe, c'est Charb, un aigle, lui aussi. Un authentique démocrate. Et c'est vrai que c'est honteux, criminel, faut le dire et le répéter, d'avoir fait basculer dans l'abstraction pure, d'une minute à l'autre, tout un matos hyper-précieux, sans compter les disques durs, qui faisait bien avancer la démocratie.
Quant à Philippe, on le sait, ça va plutôt bien pour lui. On l'entend moins, il est moins spasmodiquement agité de sa personne. Ayant suffisamment lustré dans le sens du poil le "projet de civilisation" du sarkozysme - qui a fait "plouf" mais se relance timidement de temps à autre, au gré de quelques "débats" nationaux vendus au lot et à la criée -, il a reçu comme récompense le hochet à floches "France Inter". Libéré, enfin, de la contrainte schizogène de se fader la compagnie de ces gros beaufs vulgaires ex-gauchistes qui lui répugnaient tant, il s'en trouve comme apaisé et réconcilié avec son moi profond. Il écrit aujourd'hui le deuxième tome de sa somme philosophique. Au "traité de savoir survivre par temps obscurs" succédera peut-être le "traité de savoir profiter de la vie par temps lumineux". Pourvou qué ça doure.
Quant à Philippe, on le sait, ça va plutôt bien pour lui. On l'entend moins, il est moins spasmodiquement agité de sa personne. Ayant suffisamment lustré dans le sens du poil le "projet de civilisation" du sarkozysme - qui a fait "plouf" mais se relance timidement de temps à autre, au gré de quelques "débats" nationaux vendus au lot et à la criée -, il a reçu comme récompense le hochet à floches "France Inter". Libéré, enfin, de la contrainte schizogène de se fader la compagnie de ces gros beaufs vulgaires ex-gauchistes qui lui répugnaient tant, il s'en trouve comme apaisé et réconcilié avec son moi profond. Il écrit aujourd'hui le deuxième tome de sa somme philosophique. Au "traité de savoir survivre par temps obscurs" succédera peut-être le "traité de savoir profiter de la vie par temps lumineux". Pourvou qué ça doure.
Maintenant, attention. Si je fous en guise de boucles d'oreille des bombes miniaturisées sur les bigoudis à Moïse (aka Charlton Heston) ou dans les tresses d'un hassidim sortant de la synagogue, si je montre un rabbin sodomisant un jeune officiant en pleine Bar Mitzvah, ou encore un sofer dissimulant des sacoches de diamants dans le Sefer Torah, là on n'est plus dans l'abstraction du tout. Ah non. On touche à quelque chose de sacré, et de sacrément concret moi j’te l’dis, entre quatre yeux. Ah là, c'est clair, y a pas à tortiller du croupion où à s'agiter le bocal et compagnie ou quoi ou qu’est-ce: j'incite à la haine raciale, je stigmatise une communauté concrète en usant de stéréotypes racistes. Oui, parce que les "symboles sacrés" ou les représentants du culte juifs, à l'inverse des autres, c'est pas des abstractions. On n'est plus dans le céleste et le cuicui qui effarouche les agités du bocal. On verra aussitôt que la moquerie n'est pas "neutre": qu'indirectement, par la bande, sont visées des personnes réelles, de chair et de sang. La Licra déposera aussitôt plainte, et personne ne criera "au fou" en rappelant, sur un ton paternaliste, le droit démocratique élémentaire de se moquer des religions et des religieux.
Les prophètes, aucun problème. Montrer Mahomet avec un burnout en forme de bombe, c'est exactement de la même nature et du même ordre que montrer Jésus ou Moïse dansant le french-cancan, certes. Juste comparaison. Fort pertinente et éclairante: c'est anecdotique, insignifiant, de la même totale innocuité. Faudrait vraiment être un peu agité du b..., pardon, d'une mauvaise foi crasse, pour trouver que "burnout en forme de bombe", c'est moins rigolo que "danser le french-cancan", pis aller chercher dans "burnout en forme de bombe" on ne sait trop quelle signification cachée ou message subliminal. Donc, passons.
Un gros arabe paressant sur un pouf, disant: "le Coran ne dit pas s’il faut faire quelque chose pour avoir trente ans de chômage et d’allocs" (autre œuvre poilante de Gregorius Nekschot, agréée et défendue par Val et Fourest contre les constipés et les crispés qui sacralisent tout), nous appellerons ça des moqueries, un peu plus osées, un peu plus audacieuses certes, mais qu'on laissera à l'appréciation du goût de tout un chacun. Exercice du libre droit démocratique de railler des choses abstraites auxquelles on croit pas et qui n'ont rien de sacré pour nous.
Une affiche de propagande des années 30 représentant un barbu en kippa avec des dollars à la place des yeux, et se frottant les mains avec un rictus diabolique, nous sommes par contre bien informés, même si c'est chacun son goût, sur le fait que ça ne vise pas qu'une communauté religieuse, abstraite, sur le fait qu'on n'est plus dans l'ordre de la seule caricature, de la liberté d'expression "s'étendant au droit de blesser, choquer ou inquiéter", et n'indisposant éventuellement que des bouffeurs de pain azyme. Qui pendant ce temps s'adressent des blasphèmes entre eux, et gratinés. D'ailleurs, Chrétiens, Musulmans ou Juifs, du moins ceux qui sont pas orthodoxes, adorent autant blasphémer entre-eux que se moquer de leur "communauté concrète": simplement, quand ce sont les autres qui le font, c'est moins drôle et ça manque cruellement d'imagination. Chez les Juifs, nous adorons aussi nous foutre de la gueule de certains "goys" qui voudraient se faire plus juifs que le pape. Non, je précise, au cas où quelque passionaria du bocal dépisterait au compteur Geiger dans mes propos un signe flagrant de "judéophobie".
Et à part ça. A toutes choses égales et en appliquant "juste un peu plus loin" cette saine et basique distinction entre sacré et profane, droit canon et droit séculier, du moins telle qu'elle nous est expliquée plus haut avec moult exemples avérant un sens consommé de la pédagogie amusante - distinction en vertu de laquelle je ne "blasphème" rien du tout si je raille des "symboles religieux" auxquels je ne crois pas et qui ne représentent pour moi rien de sacré, qu'est-ce qui m'interdit, au juste, de "profaner" je ne sais quels lieux soi-disant sacrés, plombés par un décorum de falbalas aussi grotesque pour moi que la tenue de guignol à chapeau pointu de Benoît XVI? Ce serait quoi, la différence de nature?
Au nom de quoi j'irais pas danser le french-cancan sur les tombes d'un cimetière musulman, chrétien ou juif, puis, éventuellement, pour la marrade, soulager Alphonse de la bibine de mon quatre-heure et y déposer ma petite crotte? J'suis protestant-œcuménique tendance matérialiste athée. Je crois pas en la survie après la mort. Les sépultures, de quelque nature ou forme soient-elles, depuis Toutankhamon et bien avant, ça me fait bien rire. C'est ridicule. A titre de manifestations d'une névrose obsessionnelle, comme disait Freud. D'ailleurs, je vais jamais aux enterrements. Je pense jamais aux morts, c'est une perte de temps. Et les cryptes, c'est bon pour les films de Roger Corman. Tout ça, c'est des symboles religieux auxquels je ne crois pas, qui ne représentent rien pour moi, et donc pour moi, y a rien de sacré ni de concret là-dedans. C'est aussi abstrait qu'un bout de papier chiffonné couvert de graffitis idiots. C'est juste des vieilles pierres couvertes de moisissures, avec des pissenlits tout autour, et dedans un peu de poussières d'ossements inoffensives. J'en ai fini depuis la maternelle avec la pensée magique, j'en suis plus à fantasmer qu'un peu de cendre éparpillée dans une sous-pente abriterait une "anima" ou je ne sais quel "pneuma". Je vais pas être saisi par le thambos à la vue du médaillon à moitié effacé d'une vieille bigote canée d'une méningite avant la guerre 14, et dont plus personne ne se souvient. Alors permettez un peu que je fasse pleurer le colosse. Le french-cancan, ça m'a bien agité la vessie. Et puis, eh oh, si ça vous choque, tant pis hein, ça s'appelle la démocratie.
Les prophètes, aucun problème. Montrer Mahomet avec un burnout en forme de bombe, c'est exactement de la même nature et du même ordre que montrer Jésus ou Moïse dansant le french-cancan, certes. Juste comparaison. Fort pertinente et éclairante: c'est anecdotique, insignifiant, de la même totale innocuité. Faudrait vraiment être un peu agité du b..., pardon, d'une mauvaise foi crasse, pour trouver que "burnout en forme de bombe", c'est moins rigolo que "danser le french-cancan", pis aller chercher dans "burnout en forme de bombe" on ne sait trop quelle signification cachée ou message subliminal. Donc, passons.
Un gros arabe paressant sur un pouf, disant: "le Coran ne dit pas s’il faut faire quelque chose pour avoir trente ans de chômage et d’allocs" (autre œuvre poilante de Gregorius Nekschot, agréée et défendue par Val et Fourest contre les constipés et les crispés qui sacralisent tout), nous appellerons ça des moqueries, un peu plus osées, un peu plus audacieuses certes, mais qu'on laissera à l'appréciation du goût de tout un chacun. Exercice du libre droit démocratique de railler des choses abstraites auxquelles on croit pas et qui n'ont rien de sacré pour nous.
Une affiche de propagande des années 30 représentant un barbu en kippa avec des dollars à la place des yeux, et se frottant les mains avec un rictus diabolique, nous sommes par contre bien informés, même si c'est chacun son goût, sur le fait que ça ne vise pas qu'une communauté religieuse, abstraite, sur le fait qu'on n'est plus dans l'ordre de la seule caricature, de la liberté d'expression "s'étendant au droit de blesser, choquer ou inquiéter", et n'indisposant éventuellement que des bouffeurs de pain azyme. Qui pendant ce temps s'adressent des blasphèmes entre eux, et gratinés. D'ailleurs, Chrétiens, Musulmans ou Juifs, du moins ceux qui sont pas orthodoxes, adorent autant blasphémer entre-eux que se moquer de leur "communauté concrète": simplement, quand ce sont les autres qui le font, c'est moins drôle et ça manque cruellement d'imagination. Chez les Juifs, nous adorons aussi nous foutre de la gueule de certains "goys" qui voudraient se faire plus juifs que le pape. Non, je précise, au cas où quelque passionaria du bocal dépisterait au compteur Geiger dans mes propos un signe flagrant de "judéophobie".
Et à part ça. A toutes choses égales et en appliquant "juste un peu plus loin" cette saine et basique distinction entre sacré et profane, droit canon et droit séculier, du moins telle qu'elle nous est expliquée plus haut avec moult exemples avérant un sens consommé de la pédagogie amusante - distinction en vertu de laquelle je ne "blasphème" rien du tout si je raille des "symboles religieux" auxquels je ne crois pas et qui ne représentent pour moi rien de sacré, qu'est-ce qui m'interdit, au juste, de "profaner" je ne sais quels lieux soi-disant sacrés, plombés par un décorum de falbalas aussi grotesque pour moi que la tenue de guignol à chapeau pointu de Benoît XVI? Ce serait quoi, la différence de nature?
Au nom de quoi j'irais pas danser le french-cancan sur les tombes d'un cimetière musulman, chrétien ou juif, puis, éventuellement, pour la marrade, soulager Alphonse de la bibine de mon quatre-heure et y déposer ma petite crotte? J'suis protestant-œcuménique tendance matérialiste athée. Je crois pas en la survie après la mort. Les sépultures, de quelque nature ou forme soient-elles, depuis Toutankhamon et bien avant, ça me fait bien rire. C'est ridicule. A titre de manifestations d'une névrose obsessionnelle, comme disait Freud. D'ailleurs, je vais jamais aux enterrements. Je pense jamais aux morts, c'est une perte de temps. Et les cryptes, c'est bon pour les films de Roger Corman. Tout ça, c'est des symboles religieux auxquels je ne crois pas, qui ne représentent rien pour moi, et donc pour moi, y a rien de sacré ni de concret là-dedans. C'est aussi abstrait qu'un bout de papier chiffonné couvert de graffitis idiots. C'est juste des vieilles pierres couvertes de moisissures, avec des pissenlits tout autour, et dedans un peu de poussières d'ossements inoffensives. J'en ai fini depuis la maternelle avec la pensée magique, j'en suis plus à fantasmer qu'un peu de cendre éparpillée dans une sous-pente abriterait une "anima" ou je ne sais quel "pneuma". Je vais pas être saisi par le thambos à la vue du médaillon à moitié effacé d'une vieille bigote canée d'une méningite avant la guerre 14, et dont plus personne ne se souvient. Alors permettez un peu que je fasse pleurer le colosse. Le french-cancan, ça m'a bien agité la vessie. Et puis, eh oh, si ça vous choque, tant pis hein, ça s'appelle la démocratie.
Mais revenons aux missiles planqués dans les tables de la loi que YHWH donne à Moïse, et autres portraits de rabbins sodomites. Autant la bombe dans le burnout c'est chacun son goût; autant l'imam pédophile et enculeur de chèvres rencontra la mansuétude de Val & Fourest, qui ne virent dans ces sains exercices démocratiques d'iconoclastie aucune forme d'"islamophobie"; autant ici on est clairement dans l'antisémitisme, disais-je. Dans la judéophobie, même, comme dit Pierre André Taguieff. La judéophobie, elle est partout. Toujours prête à ressurgir des entrailles encore fumantes de la bête immonde.
Taguieff, à une époque, faisait encore œuvre de salubrité publique en démontant avec rigueur la logique paranoïaque animant les "théories du complot". Fasciné par son objet au point de s'y laisser engloutir, il est devenu le sujet le plus contaminé par le virus qu'il traquait sans relâche, comme dans "la Chose" de Carpenter. Il a en effet mis à jour un big maousse complot aux ramifications vertigineuses, s'agitant en sous-main sur l'ensemble de la planète, peut-être même sur quelques vieux satellites oubliés de la station Mir: contre les Juifs. (*)
(*)
Quant à la question de l'islamophobie.
Premièrement, les analystes éclairés, comme Taguieff donc, mais encore Fourest, Val, Adler, BHL, Finkielkraut, Elisabeth Levy, etc, nous expliquent très bien que ce néologisme douteux (islamophobie) a été créé de toutes pièces par rien moins que des… judéophobes, qui instrumentalisent, te figures-tu, une soi-disant obsession haineuse pour le Musulman, dans le but de le victimiser et de tirer parti de cette victimisation. Et ça, c'est proprement dégueulasse. Je dirais même: c'est pervers. Parce que dans le même mouvement, les antisémites, qui ne sont rien d'autre que des judéophobes (Alexandre Adler nous l'a bien expliqué aussi, ça, et pour lui ça comprend les "Juifs honteux", qui fricotent avec les agités du bocal de l'altermondialisme gauchiste-"bobo" antisémite), accusent les Juifs d'exploiter leur statut de victimes, d'instrumentaliser la Shoah afin de légitimer la politique d'extension des colonies juives en terre d'Israël. Alors, tu comprends tout de suite, évidemment, le délire de ces agités du bocal: réunir en un seul lobbying les intégristes islamistes, les judéophobes, et les anticapitalistes altermondialistes.
Taguieff, à une époque, faisait encore œuvre de salubrité publique en démontant avec rigueur la logique paranoïaque animant les "théories du complot". Fasciné par son objet au point de s'y laisser engloutir, il est devenu le sujet le plus contaminé par le virus qu'il traquait sans relâche, comme dans "la Chose" de Carpenter. Il a en effet mis à jour un big maousse complot aux ramifications vertigineuses, s'agitant en sous-main sur l'ensemble de la planète, peut-être même sur quelques vieux satellites oubliés de la station Mir: contre les Juifs. (*)
(*)
[Note de travail interne sur P.A. Taguieff à l'attention de la sobeps. Enchainant staccato de lourds et interminables pavés, épuisant sans doute son énergie dans des nuits blanches répétées plus que de raison, Taguieff, carencé en vitamines C et surtout D, s'est mis à agencer progressivement une mise en abyme vertigineuse digne des meilleures mécaniques de John le Carré: on y découvre en effet que les obsédés du "complot mondial juif", thématique éminemment caractéristique des judéophobes depuis le fameux "Protocole des sages de Sion", ourdissent eux-mêmes un vaste complot mondial réel et actuel contre ces Juifs qui dans leur imaginaire complotent mondialement. L'Histoire est donc condamnée à se répéter, bis in idem.
La "foire aux illuminés", constituée de moult sociétés secrètes baignant dans la mystique gnostique, se rassemble en vérité dans l'organisation unifiée des obsédés de la théorie du complot global, notamment juif, formant ainsi une organisation souterraine mondiale aux ramifications aussi secrètes que tentaculaires, comparable à l'ordre de Thulé.
Des constellations mouvantes faites d'organisations aux sigles mystérieux, où le snug se présentant comme la vitrine du smog, se révèle en vérité une officine du klug, qui n'est rien d'autre que le bras armé du glok, lequel dissimule son identité et ses activités sous une organisation fictive comme le schmutz, qui sert précisément de paravent pour le snug. Dans cette "foire aux illuminés", on en est à se demander si la "théorie du complot mondial (juif)", loin d'être l'expression d'une croyance paranoïaque, n'est pas bien plutôt une fiction propagandiste entretenue et diffusée à dessein pour abriter, dissimuler un complot mondial (anti-juif) bien réel.
Les obsédés du complot seraient ainsi en réalité d'horribles comploteurs tirant les ficelles.
Taguieff a peut-être ainsi découvert, comme David Vincent, l'horrible réalité. Il a découvert que son analyse première des "théories du complot" (comme manifestation d'un délire paranoïaque) était fausse. Il a découvert ensuite une seconde horrible réalité (c'est le double effet kisscool des réalités horribles, y a toujours une deuxième couche à l'intérieur): il a été instrumentalisé dans un piège machiavélique, à lui tendu par de sinistres agents du complot mondial anti-juif. Ce sont ces derniers qui l'ont à la base incité à élaborer sa propre analyse des "théories du complot", dans le seul but qu'il démontre que ce sont des fadaises d'illuminés, contribuant ainsi à invalider aux yeux du monde l'effectivité du complot mondial anti-juif se tramant réellement. Affaire à suivre... Merci aux membres de la sobeps encore en activité de faire suivre cette note de travail au C.D.F. (conseil des farfadets), qui transmettra à qui de droit.]
Quant à la question de l'islamophobie.
Premièrement, les analystes éclairés, comme Taguieff donc, mais encore Fourest, Val, Adler, BHL, Finkielkraut, Elisabeth Levy, etc, nous expliquent très bien que ce néologisme douteux (islamophobie) a été créé de toutes pièces par rien moins que des… judéophobes, qui instrumentalisent, te figures-tu, une soi-disant obsession haineuse pour le Musulman, dans le but de le victimiser et de tirer parti de cette victimisation. Et ça, c'est proprement dégueulasse. Je dirais même: c'est pervers. Parce que dans le même mouvement, les antisémites, qui ne sont rien d'autre que des judéophobes (Alexandre Adler nous l'a bien expliqué aussi, ça, et pour lui ça comprend les "Juifs honteux", qui fricotent avec les agités du bocal de l'altermondialisme gauchiste-"bobo" antisémite), accusent les Juifs d'exploiter leur statut de victimes, d'instrumentaliser la Shoah afin de légitimer la politique d'extension des colonies juives en terre d'Israël. Alors, tu comprends tout de suite, évidemment, le délire de ces agités du bocal: réunir en un seul lobbying les intégristes islamistes, les judéophobes, et les anticapitalistes altermondialistes.
Alors, deuxièmement, je m'excuse, c'est le peuple juif qui a payé un lourd, tragique tribu, à l'éclosion de nos démocraties modernes laïques et éclairées, comme nous l'expliquent là encore les spécialistes susmentionnés. Et ça aussi, c'est concret. Faut pas oublier que la communauté juive, c'est d'abord et essentiellement le peuple des victimes sacrifiées pour la gestation d'une Europe cosmopolite, ne cessant de lutter pour affirmer les valeurs de l'universalisme, surmonter les démons identitaires, nationalistes, communautaristes, sources de clivages haineux, de crispations identitaires et de replis sur soi.
La communauté musulmane ne peut pas en dire autant. N'en déplaise à Badiou (l'antisémite).
Si on regad bien, qu'est-ce qu'elle a fait, au juste, pour nos démocraties modernes laïques, la communauté musulmane? Mh?
Oui oh, à part bien sûr diffuser chez nos mômes scolarisés, et plutôt cool, décontractés, les traditions archaïques d'une misogynie inégalitaire et quasi-atavique. Et à part disséminer dans nos cités prolétaires pas trop cool ni décontractées des prédicateurs rusés, au double langage fourbe et manipulateur, les Tariq Ramadan qui ne font rien qu'à islamiser en douce nos droits de l'homme et de la femme chèrement acquis.
Et surtout, rappelons-le, à part nous imposer leur "fichu voile", nous priver du partage des visages, sources d'où rayonne l'éthique lévinassienne, nous dit-on, la communication intersubjective dans l'espace social public enfin rendu à sa transparence.
Intersubjectivité, partage, visage, transparence, dévoilement, espace public... Que voilà des concepts bien délicats à manier, mais que l'on brandit à tout propos avec une éloquence assurée qui frise l'obscène. Car le visage d'autrui, pour Lévinas, c'est la manifestation de la Loi d'un dieu transcendant et sans visage. Le visage d'autrui commande la distance, le respect, et se dérobe à la maîtrise du regard. Il est inassignable à l'espace utile de l'échange: c'est un visage-voile. A tous ceux qui confondent allègrement visage et carte d'identité, à tous ceux qui nous psalmodient ce pieux refrain de l'offrande du visage partagé par tous dans l'espace dit public, assaini, désopacifié, immunisé, propre, lisse et luisant comme le parquet ciré du musée de l'homme, consentiriez-vous un seul instant à vous laisser dé-visager sans vergogne, par le premier passant venu? Non bien sûr, vous réserverez ce privilège précieux autant que rare aux quelques ceux, triés sur le volet, qui partagent votre bulle privative et sécure. Sous l'édredon douillet ou dans un face à face amoureux, il n'est pas d'ailleurs pas sûr que vous consentirez à l’examen prolongé de vos beaux yeux "miroirs de l'âme".
A votre décharge, on remarquera que parmi les apôtres de la res publica translucide, les plus zélés ont acquis l'art et la maitrise de la sculpture télévisuelle de soi, hommes et femmes-troncs affichant les expressions impénétrables et radieuses d'une machine impeccablement lubrifiée, imperméable à la trop humaine faiblesse. Totale maîtrise des muscles faciaux et fessiers, même dans l'orgasme.
Oui oh, à part bien sûr diffuser chez nos mômes scolarisés, et plutôt cool, décontractés, les traditions archaïques d'une misogynie inégalitaire et quasi-atavique. Et à part disséminer dans nos cités prolétaires pas trop cool ni décontractées des prédicateurs rusés, au double langage fourbe et manipulateur, les Tariq Ramadan qui ne font rien qu'à islamiser en douce nos droits de l'homme et de la femme chèrement acquis.
Et surtout, rappelons-le, à part nous imposer leur "fichu voile", nous priver du partage des visages, sources d'où rayonne l'éthique lévinassienne, nous dit-on, la communication intersubjective dans l'espace social public enfin rendu à sa transparence.
Intersubjectivité, partage, visage, transparence, dévoilement, espace public... Que voilà des concepts bien délicats à manier, mais que l'on brandit à tout propos avec une éloquence assurée qui frise l'obscène. Car le visage d'autrui, pour Lévinas, c'est la manifestation de la Loi d'un dieu transcendant et sans visage. Le visage d'autrui commande la distance, le respect, et se dérobe à la maîtrise du regard. Il est inassignable à l'espace utile de l'échange: c'est un visage-voile. A tous ceux qui confondent allègrement visage et carte d'identité, à tous ceux qui nous psalmodient ce pieux refrain de l'offrande du visage partagé par tous dans l'espace dit public, assaini, désopacifié, immunisé, propre, lisse et luisant comme le parquet ciré du musée de l'homme, consentiriez-vous un seul instant à vous laisser dé-visager sans vergogne, par le premier passant venu? Non bien sûr, vous réserverez ce privilège précieux autant que rare aux quelques ceux, triés sur le volet, qui partagent votre bulle privative et sécure. Sous l'édredon douillet ou dans un face à face amoureux, il n'est pas d'ailleurs pas sûr que vous consentirez à l’examen prolongé de vos beaux yeux "miroirs de l'âme".
A votre décharge, on remarquera que parmi les apôtres de la res publica translucide, les plus zélés ont acquis l'art et la maitrise de la sculpture télévisuelle de soi, hommes et femmes-troncs affichant les expressions impénétrables et radieuses d'une machine impeccablement lubrifiée, imperméable à la trop humaine faiblesse. Totale maîtrise des muscles faciaux et fessiers, même dans l'orgasme.
Oui, quoi, au fond, pour résumer, de tellement remarquable, digne d'être relevé pour l'émancipation de la chose publique, sinon, en un mot comme en cent, mettre en danger l'universalisme. Mh?
Allons. Soyons sérieux. Allons écouter les conférences-débats, les tables rondes et les buffets-causeries de Nadia Geerts (fervente émule de Caroline Fourest et principal relais en Belgique de son travail scientifique et universitaire) dans (quasi) toutes les maisons de la laïcité du royaume.
Nadia Geerts est également admiratrice de Mohamed Sifaoui, autre habitué des plateaux télé et grande figure du combat contre l'intégrisme islamiste. Je notais ailleurs que Sifaoui était un esprit libre mesuré, cultivant la nuance subtile: "d'un côté contempteur sans compromis d'Eric Zemmour (esprit libre laïque qui excite la xénophobie et les guerres civilisationnelles), et de l'autre défenseur ardent de Robert Redeker (esprit libre laïque qui défend la civilisation des Lumières contre l'axe du mal).
Ah ça oui, le calendrier est chargé, full-time. C'est overbookant. C'est qu'il y a encore du pain sur la planche, malgré la victoire du décret sur la coiffe bigoudène dans les écoles à risque et les salons de dentiste safe (tellement nécessaire, mais trop vite voté, à la diable, mal organisé, je suis d'accord avec toi), et malgré les sit-in, les stand-up, les actions-commandos.
Je me demande même s'il y a une date libre pour une causerie sur l'art de photographier la reproduction des escargots et des limaces du Limbourg, dans la moindre maison de la laïcité d'Andenelle ou de Barvaux-sur-Ourthe. Oui, parce qu'elle se passionne pour l'exhibition des "petites bêtes", comme elle les appelle affectueusement. J'ai vu ça dans un lien de sa notice wiki. Elle appelle ça des "instants de trêve": "autant de respirations dans une vie trépidante. De (toutes) petites choses, un instant fugace, un visage inconnu, une lumière particulière... Le bonheur indicible de l'insignifiant, du fragile, du périssable". C'est plutôt vachement poétique, non?
Ces "visages inconnus" révélés en pleine lumière, ce sont de préférence des insectes ou des gastéropodes, qui ont au moins le mérite de ne jamais la contredire quand elle les passe au grand angle. Peut-être aussi parce qu'un gastéropode, sorti de sa coquille, de son exosquelette, c'est tout cru, tout nu, tout dévoilé et tout luisant, tendre chair offerte comme un sexe déboutonné, sans fausse pudeur ni secrets honteux dissimulés dans la pénombre hypocrite d'un confessionnal. Si si, les nouveaux hygiénistes de l'ordre social, spécialisés dans l'art de bien jouir face au soleil, nous l'enseignent. L'ère nouvelle, vitaliste et libertaire, aura le visage d'une Orgone, et le corps d'une planche orgastologique étale.
Sinon, en dehors de la "trêve", y a beaucoup à s'occuper. Et ça rend la vie trépidante.
Y a la collusion avec l’évêché, les soutanes, les ecclésiastiques pédophiles essaimant encore dans nos campagnes reculées, pourtant aux portes de l'universalisme démocratique, elles aussi, mais empêchées, tirées en arrière, par des mentalités de clocher, un clientélisme catholiqueux d'un cynisme à couper le souffle.
Y a le fascisme à s'occuper, bien sûr. Qui ne passera pas, ah non, qui ne passera pas. Nadia Geerts fera rempart de son corps, s'il le faut, pour que le fascisme ne passe pas. Elle occupera tous les postes disponibles de prof de philo et de morale dans toutes les Hautes Ecoles de Bruxelles, s'il le faut, pour faire barrage contre les fascistes, et certains agités du bocal aussi, qui squattent (heureusement en vain) les appels d'offre annuels du ministère de la communauté française. Elle y enseigne certainement la liberté selon Sartre, le dévoilement selon Heidegger et la résilience des escargots selon Boris Cyrulnik. Pédagogie, quand tu nous tiens.
Non, on est pas sorti de l'auberge encore, moi j'dis. Et je me demande bien comment Nadia trouvera le temps d'écrire sa thèse, bien au calme, loin du show-business, loin des agitations vaines de la société du spectacle et des loisirs, loin des limaces, alors que s'attise encore la braise des intégrismes, des royalismes, des papismes, jusque dans nos cantines, nos garderies et nos pouponnières.
Y a le roi, aussi, à s'occuper, vestige archaïque d'un phallocentrisme médiéval où on brûlait encore les sorcières sur la place publique, t'en souvient-il? Ah mais. Faut être subversif. Faut oser. Choquer, déranger la bonne conscience repue des gens endormis, à l'hospice, devant leur soupe tiède, à l'heure de feu Hörst Tappert.
Et Nadia, c'est ça qu'elle fait: elle dérange. "Langue de bois", "angélisme", "frilosité", "political correctness": elle pulvérise, elle atomise, comme Raoul. Libre-z-et fière, insolente et insoumise, elle secoue, électrocute, les conformismes et les bienpensances. Elle traumatise autant le bourgeois catho que le gaucho-bobo, elle défie le fasciste, brave le fanatique islamiste, protège et sauve la petite Fatima brimée et soumise sous le voile oppresseur, enlève la moumoutte à Baudouin, terrorise le curé pédophile, met les pieds dans le plat, mouche le cuistre, réveille les asthnétiques, berce les insomniaques, va, vole et nous venge.
Nadia a une philosophie, un type de pensée bien calibré: la pensée RTBF. Elle est donc bien partie, elle aussi.
Nadia vit dans un monde concret, saisie par l'urgence de problèmes importants.
Les conditions infra-structurelles, essentiellement d'ordre économique, déterminant le partage des dominants et des dominés, des riches et des pauvres, produisant le chômage, la délocalisation, l'exclusion, la dislocation du champ social, la démantibulation des droits sociaux, la désignation de bêtes noires, la production de voiles de fumée pour détourner l'attention des quelques ceux qui se partagent avec courtoisie les capitaux; le story-telling; la production, pour occuper et agiter le temps de cerveau disponible de bocaux épuisés par les trois-huit, de fictions très inquiétantes: sur l'augmentation d'la r'crudescence des hooligans et des barbares, les caprices ingérables de ce petit dieu turbulent qui n'en fait qu'à sa tête et qu'on appelle le "marché; l'atomisation, la désintégration, les feux follets qui hantent les parkings et les terrains vagues en bordure des complexes industriels, des trusts d'entreprises, des centres de rétention et de loisir pour quelques sans-nom et sans-papier, toutes ces choses, pour elle, c'est des abstractions célestes, et elle s'en bat le stetson.
Nadia n'est pas vraiment archéo-marxiste. Elle vit dans un monde intégralement et exclusivement superstructurel. Les seuls problèmes et enjeux qui agitent ce monde sont au fond idéologiques. Les forces convulsives qui s'y heurtent sont de symboles, d'idées, de valeurs, de doctrines, de convictions: humanisme, laïcité, emprise du religieux, choc des civilisations, affirmation de son identité, droit à la caricature, à bas le voile et la calotte, à bas la morale religieuse, vive la religion laïque, vive la confession libre, à bas la confession forcée, etc, etc, blablabla.
"La" religion - si quelque chose comme une telle entité massive et monolithique existe (une abstraction "dent creuse" comme disait Deleuze) - a peut-être été, est encore, et sera peut-être encore l'opium du peuple, le voile de fumée qui occulte ou fait oublier la misère du plus grand nombre et "les petites misères" de quelques uns. Sans doute, sans doute.
Mais aujourd'hui, il y a surtout un nouvel opium, très "hype", dont on est semble-t-il fort occupé à faire la promotion canon: l'opium de la guerre (civilisationnelle) des religions (obscurantistes contre le monde libre et éclairé).
Pas trop cher à produire, se vendant bien et pouvant rapporter gros, relativement facile à mettre en scène à la télévision et autres organes de presse étatiques. A consommer sans modération. Il remplit exactement les mêmes fonctions, et présente un double avantage intéressant à exploiter. Il est non seulement susceptible de "voiler" aux yeux d'une majorité leur exclusion de l'opulent marché mondialisé qui profite à une minorité de nantis, mais encore il autorise - du moins en principe - que les pauvres et exclus de ce monde se divisent et se bouffent le nez entre eux, se rendant mutuellement responsables de cet état de fait.
Pour déchirer ce voile aliénant et entêtant, il faudrait un peu plus d'archéo-marxistes, un peu plus vigilants, un peu plus indépendants, un peu moins adoubés par la machine à produire des superstructures idéologiques, du divertissement et des loisirs, et y trouvant moins leur plaisir.
Au rayon du rire libérateur, il faudrait écrire, en guise d'apostille au dernier best-seller de C. Fourest ("l'universalisme en danger"), répétant toujours, sans se fouler et sans imagination, la même recette, "le monde de Nadia", alternative pataphysicienne au "monde de Sophie".
Le monde dans lequel vit et pense Nadia est une sorte de pièce de théâtre ou d'opérette de la belle époque, donnée à guichets fermés dans un petit bo... chapiteau sous la voûte étoilée, pleine de rebondissements, de bruit et de fureur, de batailles d'Hernani, de querelles trépidantes et de mondanités fracassantes, de tables rondes et de monologues carrés.
S'y agitent, s'y étreignent, s'y invectivent des passions humaines, éternelles et utiles, sous forme de dyades inséparables, de couples maudits générant sans fin des énoncés intéressants:
des démocrates et des fascistes, des esprits libres et des fanatiques, des humanistes et des spiritualistes, des républicains et des royalistes, des laïcards et des cathos, des rattachistes et des belgicards, des civilisés et des barbares, des féministes et des phallocrates, des universalistes et des communautaristes, des antiracistes monoculturalistes et des racistes multiculturalistes, le colonel Sponsz et la castafiore, un roi qui se meurt et une cantatrice chauve, le cœur et l'esprit, la pensée et les hommes, la tête et les jambes, le francophonissime, maître Capello, Guy Lux, Léon Zitrone, l'eurovision, un pape, deux dictateurs, trois grenouilles de bénitier, quatre prédicateurs, quelques ratons-laveurs, et surtout une sacrée tripotée d'escargots et de limaces.
Quelques bonnes feuilles de Mona Chollet, tirées de l'ouvrage collectif: "Les éditocrates. Ou comment parler de (presque) tout en racontant (vraiment) n'importe quoi", par Mona Chollet, Olivier Cyran, Sébastien Fontenelle, Mathias Reymond, aux éditions La Découverte:
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire